Les droits des interdits bancaires en matière de compte courant
Comprendre la notion d'interdit bancaire
Lorsqu’un individu est fiché en tant qu'interdit bancaire, cela signifie qu’il a été inscrit au Fichier Central des Chèques (FCC) ou au Fichier des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers (FICP) par la Banque de France. Cette situation survient généralement après l’émission d’un ou plusieurs chèques sans provision ou en cas de défaut de remboursement de crédit.
Contrairement à certaines idées reçues, être interdit bancaire ne signifie pas que la personne est privée de tous ses droits bancaires. En réalité, il existe une gamme de protections et de dispositifs légaux pour garantir un minimum de services. Cet article a pour objectif de détailler l'ensemble des droits des personnes en situation d'interdiction bancaire, principalement en matière de compte courant.
Le droit au compte : une garantie essentielle
Le premier droit fondamental des personnes fichées est le droit au compte. Ce droit, prévu par le Code monétaire et financier (article L312-1), stipule que toute personne physique résidant en France, et même les personnes morales, peuvent demander l’ouverture d’un compte courant, même en cas de fichage FCC ou FICP.
Lorsqu’une banque refuse l’ouverture d’un compte, elle est tenue de remettre une attestation de refus. Cette attestation de refus permet ensuite de saisir la Banque de France pour bénéficier de la procédure de droit au compte. Ce mécanisme permet d’obtenir l’ouverture d’un compte gratuit dans une banque désignée par la Banque de France elle-même.
Ce compte bancaire inclura un ensemble minimal de services bancaires gratuits, que l’on appelle aussi les « services bancaires de base ».
Les services bancaires de base accessibles à tous
Les services bancaires de base sont définis par décret. Ils sont également offerts à toute personne qui exerce son droit au compte via la Banque de France. Ces services permettent de mener une vie financière minimale et sont généralement gratuits pour la personne concernée.
Ces services comprennent :
- L’ouverture, la tenue et la clôture du compte
- La délivrance de relevés d'identité bancaire (RIB)
- La domiciliation de virements bancaires
- L’encaissement de virements bancaires et de chèques
- La mise à disposition d’une carte de paiement à autorisation systématique
- La possibilité de réaliser des opérations de retrait en espèces
- Deux chèques de banque par mois
- Des moyens de consultation du compte à distance
- La réalisation de dépôts ou de retraits d’espèces au guichet
Ces mesures assurent aux personnes en situation délicate une insertion financière minimale et évitent tout isolement du système bancaire.
Les restrictions liées au compte bancaire
Malgré l'existence du droit au compte, un interdit bancaire voit sa liberté d’action fortement restreinte dans certaines dimensions de la gestion bancaire. Ces restrictions sont mises en place pour limiter les risques financiers, autant pour la banque que pour le client.
Parmi les limitations, on retrouve notamment :
- La suppression immédiate du droit d’émettre des chèques
- Le refus ou la suppression des facilités de découvert
- L’accès restreint à certains moyens de paiement, comme la carte de crédit ou les prélèvements automatiques
Les banques peuvent décider de ne proposer qu’une carte à autorisation systématique, c’est-à-dire une carte qui interroge le solde à chaque transaction et refuse les paiements en cas de fonds insuffisants. Ce moyen de paiement vise à éviter les incidents liés au dépassement du solde disponible.
Peut-on changer de banque en étant interdit bancaire ?
Oui, il est tout à fait possible de changer de banque même si l’on est interdit bancaire. Cependant, les établissements bancaires sont libres d’accepter ou de refuser une demande d’ouverture de compte dans un cadre classique. En cas de refus, le client peut activer le droit au compte auprès de la Banque de France pour obtenir l’ouverture d’un nouveau compte dans une autre banque.
À noter qu’il existe des solutions alternatives aux banques traditionnelles, comme les néobanques ou banques en ligne, qui proposent des comptes sans conditions de revenus ni d’historique bancaire. Certaines de ces institutions acceptent des clients en interdit bancaire et offrent des services modernes et accessibles.
Les obligations des banques vis-à-vis des interdits bancaires
Les établissements bancaires ont également un ensemble d’obligations à respecter envers leurs clients, y compris lorsqu’ils sont fichés. Les banques doivent :
- Informer clairement leur client de son fichage au FCC ou FICP
- Remettre un relevé d’incident qui précise les éléments entraînant le fichage
- Informer sur les modalités de régularisation pour lever l’interdiction
- Maintenir les services bancaires de base si la personne bénéficie du droit au compte
Le non-respect de ces obligations peut être considéré comme un manquement et donner lieu à des réclamations auprès du médiateur bancaire ou de la Banque de France.
Les démarches pour lever une interdiction bancaire
Une interdiction bancaire n’est pas éternelle. Elle peut être levée avant son terme sous condition de régularisation. Le terme maximal de l’interdiction est de 5 ans mais certaines actions du client peuvent accélérer la levée du fichage.
Les principales démarches pour sortir de l’interdiction bancaire sont :
- Régulariser les incidents à l’origine du fichage, en approvisionnant le compte pour couvrir les chèques rejetés
- Contacter la banque pour qu’elle informe la Banque de France de la régularisation
- Explorer des solutions de remboursement des crédits en cas de fichage FICP
Une fois les incidents régularisés, la levée de l’interdiction intervient généralement sous un délai de 24 à 48 heures suivant la mise à jour du fichier par la banque.
Quelles alternatives au compte bancaire classique ?
Pour les personnes ne pouvant ou ne souhaitant pas ouvrir un compte en banque classique, plusieurs alternatives existent aujourd’hui. Ces solutions sont souvent plus souples et répondent aux besoins spécifiques des personnes fichées.
On trouve notamment :
- Les comptes sans banque, accessibles en ligne, avec RIB français ou européen
- Les cartes prépayées rechargeables, utilisables comme une carte bancaire classique
- Les comptes auprès de banques en ligne acceptant les profils à risque
Ces outils permettent de recevoir un salaire, effectuer des achats en ligne, retirer de l'argent, et gérer ses finances du quotidien sans posséder un compte dans une banque traditionnelle.
L'accompagnement social et juridique
Enfin, certaines personnes en situation d’interdiction bancaire peuvent avoir besoin d’un accompagnement spécifique, surtout lorsqu’il s’agit de comprendre leurs droits ou de faire valoir leurs recours. De nombreuses structures existent pour aider les consommateurs : les maisons de la justice et du droit, les Points Conseil Budget (PCB) ou encore les associations de consommateurs.
Il est fortement recommandé de se rapprocher également d’un conseiller de la Banque de France ou d'un assistant social pour examiner les possibilités d'aménagement de dettes ou de recours légaux.
Être interdit bancaire est une épreuve, mais ne signifie pas l’exclusion totale du système financier. Grâce à un encadrement juridique robuste, des solutions pratiques et un accompagnement adapté, il est possible de surmonter cette situation et de rétablir progressivement sa dignité financière.